28.9.08

Bernard Purdie - Lialeh


En 1974, le batteur Bernard "Prettie" Purdie grave cette BO d'un obscur film X, et premier d'une veine blax-porn-ploitation qui fera des émules. Ballades soul et rythmes funky qu'on ne devinerait pas nécessairement en illustration de ce genre de film ; n'étaient quelques tracks plus chauds assaisonnés d'"explicite lyrics" (comme disent les américains) et de lointains soupirs.

Here we have the soundtrack to LIALEH, the first major black porn movie and final word in soulful shagging music. this Shaft-era classic was released in 1974, and since then it's been R.A.R.E finding this one. Legendary drummer Bernard "Pretty" Purdie composed, produced and performed LIALEH's score, while between projects with Curtis Mayfield, Aretha, The Last Poets, The Rolling Stones, James Brown...
A copy of LIALEH could cost more than $200 on eBay ...
From Milk Crate

27.9.08

Francesco Finizio - Dialogues avec la grande distribution

Pour continuer sur les marques et la grande distribution, je ne peux m'empêcher de vous livrer la (soi-disant) très sérieuse lettre d'un prétendu Francis Devriendt au Directeur d'Auchan à Marseille.
Ce dispositif énonciatif - bien entendu - complètement factice est l'oeuvre de Francesco Finizio. Il vise à piéger le distributeur et à le mettre en (mauvaise) posture de répondre sérieusement à une doléance atypique, naïve voire idiote, située dans un à-cheval saugrenu entre l'art et la publicité ; doléance qui ne saurait correspondre aux attentes du supermarché, mais qui interroge, dans sa démarche, l'hypothèse assez surréaliste du produit de grande consommation présenté sous forme d'installation dans une grande surface, comme dans une galerie d'art contemporain.
Le plus drôle est d'imaginer que cette lettre a probablement fait le miel ricanant et cynique du service des ressources humaines, qui s'est ensuite appliqué à éconduire "sincèrement" le demandeur.


Cliquez sur la lettre pour l'agrandir.
La lettre est extraite de l'essai très documenté de Jean-Yves Jouannais sur L'idiotie. Elle est accompagnée de trois photographies que mon scanner malheureusement défectueux ne peut reproduire.
Imaginez la première : trois bananes disposées en triskel sur un carrelage blanc...
Installé à Marseille peu après sa participation à Cosmos au Magasin de Grenoble (1995), Francesco Finizio montre dans la ville phocéenne un travail dont la reconnaissance ne peut aller qu’en s’amplifiant. Son exposition à la galerie RLBQ, conjointe à la présentation d’une oeuvre au [mac], confirme ainsi sa Ligne ouverte (2000) achetée par le Frac, ses Dialogues avec la grande distribution (2001), son Centre de tri visuel (2002-2003, au 3bisF d’Aix), ses Transmetteurs polyphoniques de rêves, Pléstéchonne et Eco-Filtre audiophonique, également visibles au [mac] en 2003. D’ascendance italienne, Francesco Finizio, vivant en France, est bien américain: né à New York en 1967, il y a fait ses études artistiques au Hunter College, là où son enseignant Robert Morris a lui-même passé ses diplômes. De tels zigzags culturels ne sont certainement pas étrangers à l’une des constantes de son travail: la mise en visibilité – en audibilité – des difficultés de transmissions ou de traduction de toute forme de langage, verbale ou visuelle. Sylvie Coëllier, historienne d'art.

22.9.08

Tétrabrik et marketing durable



On n'a vu que ça la semaine dernière sur les affiches parisiennes : Oui aux petits producteurs! Une création de marque atypique et inédite, qui mérite qu'on s'y arrête un moment.
L'initiative de Candia semble louable qui promeut un lait solidaire favorisant la production de petits producteurs du Massif central. C'est surtout l'identité de marque et la communication qui attirent l'attention : par leur tendance à sur-signifier les bonnes intentions de Candia, elles laissent sceptique sur la véritable dimension éco-solidaire du dispositif.

Tout d'abord un nom de produit original, une exclamation en forme de slogan, qui ouvre un nouveau registre, celui des marques pour ainsi dire "politisées" ; on peut le scander en trois temps : un "oui" énorme comme la typo, pour dire combien on est d'accord et une suite bien balancée en 2 X 3 syllabes (aux-pe-tits/pro-duc-teurs !). La vertu d'un nom-manifeste de ce nouveau genre, c'est d'être incontestable (personne n'a envie de leur dire Non ! aux petits producteurs) : il transforme le consommateur en militant enthousiaste du commerce équitable au moment même où ce dernier s'empare de la brique et l'exhibe dans son caddie. Remarquez cependant le saut qualitatif de Candia par rapport à toutes les marques qui rappellent discrètement leurs sources solidaires, via des labels tels que Max Havelaar.
L'engagement solidaire valorisé à la marge chez les autres devient l'identité même chez Candia, c'est gonflé et astucieux !

Passons sur l'amalgame assez flou de la désignation des bénéficiaires, à la fois "petits producteurs" et "exploitations familiales", comme si c'était la même chose. Quid des grandes exploitations familiales et des petits producteurs non familiaux ?

A ces engagements de commerce vertueux (voir le site) où consommateur et marque peuvent clamer de concert leur credo dans l'économie durable et solidaire, une seule voix manque : celles des fameux "petits producteurs". On ne les entend pas, les 16 familles d'exploitants laitiers du Massif central, parler de "comment ce contrat avec Candia leur garantit un prix juste" ? (alors que les anciens distributeurs leur imposaient des prix injustes), de "comment ce nouveau partenaire accompagne techniquement et financièrement les producteurs défavorisés" ?. Accompagnement technique et financier, préoccupation sociale et géographique (ils sont "défavorisés" - aah... nature injuste !) Voilà une grande marque qui prône l'égalité d'accès aux débouchés de production laitière, se donne des missions d'aide socio-économique. Diable, que de promesses ! Et qu'en pensent les exploitants concernés ?

Mais le pompon, c'est l'injonction à laquelle vous avez droit, en tête du packaging : Respirez ! Comme pour dire : "Prenez un bol d'air... et de lait en même temps" (ça s'appelle un zeugme en rhétorique) ; en patois marketing ça s'appelle "deux promesses pour le prix d'un seul produit". Ou alors est-ce que le fait de humer ce bon lait procure l'équivalent d'une randonnée en montagne (métonymie) ? Malin tout ça ! C'est Chamina qui va pas être content... Concurrence déloyale ! Le Vieux Campeur va porter plainte.

20.9.08

Monolake - Gobi The Desert


Amateurs d'ambient, précipitez-vous sur le blog A closet of Curiosities (en lien à droite), l'auteur met en partage Gobi The Desert, un joyau d'ambient (dont le CD devient rare) réalisé en 1999, par le duo Robert Henke et Gerhard Behles, sous le nom de Monolake. Plus de 30 mn de dérives oniriques entre chants de cigales d'un lointain oasis, souffles de sable et granularités électroniques.

Robert Henke and Gerhard Behles's ambient piece is evocative of the place that is the name of this recording. The listener is immersed in what could be a recreation of the environment of the Gobi Desert during dusk and night time with crickets, cicadas and other insects chirping. Or are those just clicking electronic sounds that sound like insects? Other computer generated sounds and electronic drone patterns are mixed in with the insect sounds.

18.9.08

Les nuits de l'Epouvante - Dargaud


Deux jours après avoir lu dans Chronic'Art un petit billet bien tourné sur cette BD intrigante et qui m'était inconnue, je la trouve par hasard dans une librairie d'occase parisienne. Aubaine ! Les trames narratives sont relativement basiques mais chaque histoire, assez courte, décolle très vite dans une direction horrifique imprévisible. Momies, hallucinations, chats pervers, rencontrés par un héros dandy appelé sur tous les fronts du macabre. Le traitement graphique est, paraît-il, sous des noms d'emprunt fantoches, assuré par "l'immense José-Maria Béa", collaborateur de Warren Publishing, à l'origine des fameux Barbarella. Son style de BD est empreint de thèmes symbolistes et de cauchemars psychédéliques, restitués par des couleurs saturées, flashy, par une représentation du surnaturel qui rappelle lointainement les délires graphiques et chromatiques des meilleures pages de FRED et sa BD Philémon.



16.9.08

Karen Finley - The Truth is Hard to Swallow


Il est vrai que la pochette est immonde et que les créations "radicales" de Karen Finley, performeuse, poétesse, auteure, comédienne et américaine, sont très controversées. Son excellent maxi "Tales of Taboo" (86), et son premier album (ci-dessus, jaunissant dans mes LP depuis 88), avaient fait l'effet d'une grosse claque dans les milieux arty, faisant passer Nina Hagen, la grande prêtresse transgressive de l'époque, pour une enfant de choeur.
Karen Finley revendique sa liberté d'exprimer des vérités cyniques sur le machisme (Gringo), des fantasmes sur la sexualité, et de tristes réalités sur l'abus sexuel et sur la consommation (The Father in All of Us). Mais ce sont les moyens de la dame qui choquent et lui ont valu d'être censurée avec l'étiquette obscene : son lexique ordurier, ses récits sardoniques dévidés entre râles porno et hystérie évangéliste. La mise en scène, assez simple mais impressionnante, en rajoute une couche ; car un des principes de performance de Karen Finley est de se faire recouvrir de produits agro-alimentaires (sirop d'érable, chocolat, etc.) chargeant tout à la fois son corps d'une image de femme-bonbon et son discours d'une satire de l'hyper-consommation.
On a pu la voir à Paris, à la fin des années 80, faire exploser sur son corps nu, par paquets de 6, des esquimau à la vanille un peu ramollis... Je vous laisse le soin de l'interprétation. Karen Finley slame sur des rythmes de disco cuisinés avec des beatbox à trois balles et des arrangements par endroits somptueux (Tender Animal). Elle hurle, imite, soupire, vitupère avec une énergie incroyable... Ecoutez-la, c'est une des dernières "angry woman" du tournant du siècle, même si ça ne se voit pas sur les photos ci-dessous.


Finley’s transgressive performances have long provoked controversy and debate in the U.S. and abroad. She is the author of Shock Treatment, Enough Is Enough, Living it Up, Pooh Unplugged and A Different Kind of Intimacy, and is the editor of Aroused: A Collection of Erotic Writings. She has won an Obie and was named Woman of the Year in ‘98 by MS. Magazine and Artist of the Decade in ‘99 by Coaguala. She is currently a professor in Art and Public Policy at Tisch School of the Arts, New York University, and is teaching at the Writers' Center. She lives in Tarrytown.

15.9.08

Plonk & Replonk - La face cachée du Léman



Trouvé donc chez nos amis du Lièvre de mars (la librairie en dessous), ce subtil opuscule de collages illustrant de prétendus Mythes, légendes et sornettes sur le Léman. L'ouvrage est réalisé par le collectif de graphistes et éditeurs suisses Plonk & Replonk à l'aide de vieilles cartes postales, avec un humour surréaliste de la plus belle eau.




Le lièvre de mars


Très agréable surprise que cette petite librairie, nouvelle dans le quartier de La Plaine, rue des 3 mages à Marseille. On y trouve d'un côté une large sélection d'ouvrages de référence sur la typographie, le graphisme, l'art contemporain, plus différents livres d'artistes numérotés et autres merveilles sérigraphiées ; de l'autre un éclectisme de libraire avisé, amateur de surréalisme, d'érotisme et d'autres écrivains appréciables, modernes et anciens. Au fond une vieille presse d'imprimerie, genre Heidelberg, attend que ses nouveaux propriétaires la bichonnent pour dérouler des kilomètres d'aventures poétiques derrière sa locomotive à encre.
Cliquez sur le titre de cette notule et vous serez transporté jusqu'au site de le lièvre de mars ! 21 rue des 3 mages - 13001 Marseille. 09 50 45 51 13.

6.9.08

Jason Corder alias Off The Sky

J'avais prévu de vous parler de Jason Corder, musicien originaire du Kentucky, qui n'a pas attendu d'avoir le studio de Jean-Michel Jarre pour créer d'amples dérives ambient, d'une simplicité majestueuse (qu'on en juge d'après la vidéo ci-dessous où on le voit manipuler un matériel d'apparence assez humble : quelques filtres, claviers et instruments, une poignée d'enregistrements naturels ou machiniques). L'excellent blog Spiritual Archives, dans lequel j'avais découvert le bonhomme, m'a doublé en publiant un post très complet sur les productions d'Off The Sky (plus d'une dizaine à son actif sans compter les duos, compromis parfois moins inspirés) ; j'invite donc les amateurs à s'y rendre.
D'autres aspects du travail de Jason Corder forcent le respect. Il y a d'abord la générosité avec laquelle il multiplie sur son site et ailleurs les titres en téléchargement libre ; ce n'est pas non plus qu'il réserve ses morceaux aboutis au CD et ses esquisses au format internet - car on se contenterait volontiers des mp3 files tant il y a déjà là matière à rêver, riche en phosphènes, pauvre en déchets et matières grasses.
N'allez pas croire que la facilité inspire ces plages climatiques et frémissantes. Jason Corder est un passionné des mouvements du temps et des nuages, des tonalités que la lumière imprime dans les paysages. A propos du disque en écoute sur la partie droite du blog, il évoque ici sa démarche, les longues heures d'enregistrements, les passages de filtres, jusqu'à obtenir les diffractions imprévisibles d'un écheveau de lumière pure.
"This group of songs (or 'studies', as I think of them) is a DSP-manipulation concept piece based around my visual and mental explorations of the often chaotic and unpredictable seasonal climates here in Kentucky where I live. Throughout the entire project, which spanned over several seasons, I spent countless hours wandering around outside capturing raw natural sounds such as frozen trees, wind through leaves and storms to use as textural backdrops. Most of the melodic aspects of the studies involved samples of an old piano and various guitars run through numerous DSPs over and over so as to remove any obvious connections to their sources.

The main production method I used to capture the extreme unpredictability of the weather was by setting up dozens of sample loops run through numerous effect chains in Audiomulch. Then by linking various parameters to several midi controllers, all the tracks were recording live in one take each. That way I think I was able to create plenty of little mistakes to give the whole album a somewhat loose, unpredictable feel - just as the skies are chaotic."


Since Jason Corder decided that becoming a weather man was farcely over-rated, he coined the ambiguously fitted moniker "offthesky" which was in reality birthed in transit of his experimenting with converting chaos theories (especially those relating to weather systems*) into musical forms. And really its just an apropos title summating this atmospheric and acoustic communal project emanating from his studio in Kentucky ergo USA. Sounds pretentious I know, but offthesky is truly a humble handle that reflects both Jason's mild manered nature and his "in-the-clouds" mind-set when relating to others. His musical miasmatic manifestations are loosely inspired by chaos theory mathematics, dark foreboding jazz, and various natural susbstances...

4.9.08

Denis Jourdin - Frissons d'espace


De cet auteur français né à Sancerre en 1950, actuellement professeur à l'École supérieure des Beaux-Arts de Tours, je n'ai que la troisième de ses BD, sortie chez Futuropolis en 89, une savoureuse histoire de savant qui tombe amoureux d'une espionne de l'Est...
Voici quelques planches de son dessin original, ludique et déstructuré, ses drôles de personnages, avec des mots en guise de bouche.





Malone & Barnes and Spontaneous Simplicity - Freedom Serenade


Ces deux-là se sont rencontrés à la Howard University à Washington, sous la houlette de Donald Byrd (il y a des profs moins talentueux !), et sont tombés assez vite d'accord et ensemble dans la marmite d'un soul jazz riche, spirituel et inspiré. Johnny Malone chante et écrit les ballades, Allan Barnes joue du saxophone et de la flûte au sein des déjà populaires Blackbyrds, leurs fac'mates sont Donny Hathaway et Leroy Huston (il y a des étudiants moins talentueux!). Autant dire qu'avec de tels pedigree, les deux copains allaient bientôt fonder le ci-devant groupe Spontaneous Simplicity, et produire en 1976 Freedom Serenade, un album aujourd'hui devenu très rare. C'est grâce à la réédition récente du label Ubiquity que l'on peut savourer cet élixir de jazz funk fusionnel, naviguant loin entre les sphères de Sun Ra et Parliament, et dont les ballades vocales s'épanouissent dans une atmosphère soulful.

Jazzy soul from the team of Jonni Malone and Allan Barnes, working here with the Spontaneous Simplicity group -- a combo named after an old Sun Ra tune! The feel of the album is somewhere in the territory of the hipper work on Fantasy Records in the mid 70s -- indie soul that has a sweetly spiritual approach, and a fair bit of jazz in the mix -- all served up with some wonderfully warm production! Some tracks are upbeat groovers aimed at the dancefloor, but with an overall deeper mode of expression that has great solos really stretching out -- while others are more laidback, with a 70s righteous take on the groove. Malone plays keyboards and sings, Barnes plays "Afro horns" in a Oneness Of Juju way, and the album also features work by a number of other ensemble players.