27.7.08

Kimiko Yoshida - Brides

Le visage dans la lune sur la pochette de Steve Shehan me rappelle lointainement la nouvelle série des autoportraits aux "Lettres" de Kimiko Yoshida, artiste japonaise (installée en France depuis 1995), qu'on a pu voir en personne aux Rencontres d'Arles, il y a deux semaines, où était exposé une partie de son travail. Je reproduis au dessous une sélection de son extraordinaire série des "Brides", qui hantent son imaginaire d'enfant jouant aux poupées et aux "mariées".

Le fond et le sujet se confondent : cette mariée orientale ou yéménite a-t-elle encore une identité distinctive en dehors de sa parure ?

Tiare futuriste et fleur de lotus traditionnelle, bel équilibre des masses chromatiques...mais attention à la tendance pub Shiseido !

Je ne peux m'empêcher de voir dans ce chignon sur soleil levant le champignon d'Hiroshima.

Malicieuse référence au célèbre Pikachu, ou comment le dessin animé, nouvelle mythologie, envahit la psyche japonaise.

Vénéneuse sorcière, mariée arachnéenne, presque Gorgone, pourrait-on affronter son regard ?






26.7.08

Steve Shehan - Indigo Dreams


Steve Shehan est une des trois facettes de l'excellente formation Hadouk Trio, mais son oeuvre solo, moins connue, est aussi hautement recommandable. Depuis près de 20 ans, le plus "frenchy" des percussionnistes américains fait parler les fûts, peaux, cloches et baguettes de sa collection d'instruments rapportés du monde entier. La diversité de son inspiration, de ses influences et collaborations, infusent sa musique de tonalités exotiques, et font résolument de Steve Shehan un musicien du voyage, parcourant le monde, à la recherche de sonorités qu'il recompose en studio, avec le talent d'un orfèvre des sons.
Ce quatrième album est inspiré de "La nuit Indigo" de Satyajit Ray,
"flash épicé cueilli au détour d'un village de brousse, ou fresque étalée dans une permanence rythmique, chaque morceau avance dans une foisonnance instrumentale, où claquent les peaux des djembés, des darboukas et des kendangs, scintillent les cloches et les cymbales, battent les fibres boisées des angklungs, se creusent les harmoniques des poteries sonnantes, et luisent les vagues dorées des gongs."
Bruno Heuzé, in Crystal Infos, 1996.

The surveyor of the planet...Steve SHEHAN has the unique gift of being able to gather together all the flavors of the voyage, and to cook them together in the great cauldron of his vibrant percussion...What is revealed here is well beyond world-music, it's the music of a citizen of the entire world. So said Keyboards magazine. This American living in Paris is of mixed Cherokee and Irish extraction. His taste for exploring the world and its music has produced one of the most interesting contemporary percussionists.

20.7.08

Georgia Russell - Livrés au scalpel




Livre-anémone de mer, livre vulve solaire, livre hirsute, livre masque primitif, livre dentelle à l'ancienne... je poursuis la série des livres extraordinaires. Après le Livre de Chair d'Artur Barrio, voici le travail au scalpel d'une artiste écossaise, qui dissèque minutieusement les pages de livres pour en faire des ébourrifements de lanières, de plumes et de fibrilles. Georgia Russell répond à la question "Que pouvez-vous tirer de ce livre ?". Elle, en extrait le contenu au sens propre, nous fait accéder, au-delà de leur sage format de pages tassées sur un seul plan, à une beauté nouvelle, tridimensionelle, sauvage et animale.




Georgia Russell is a Scottish artist who uses a scalpel instead of a brush or a pen, creating constructions that transform found ephemera, such as books, music scores, maps, newspapers, currency and photographs. Represented by England & Co, she exhibited recent works in the gallery's December exhibition. She currently has three works included in the Holland Paper Biennial at the Coda Museum. Russell's next major exhibition will be held at England & Co in early 2009, and she will also have some works in the gallery's Summer Exhibition in July/August this year.

19.7.08

Milton Banana Trio - Balancando

Probablement le meilleur album de ce musicien exceptionnel, qui a façonné le son de batterie dans la bossa nova, et concocte ici, avec un combo pourtant minimal (Cid au piano et Mario à la basse), une mixture irrésistible de classiques bossa nova et de jazz, pulsatile et entraînante. Mon titre préféré : Sao Salvador.

Track List

01 - Cidade Vazia (Baden Powell / Luis Fernando Freire)
02 - Barquinho Diferente (Sergio Augusto)
03 - São Salvador (Durval Ferreira / Aglaê)
04 - Amanhã (Walter Santos / Tereza Souza)
05 - Improviso (Cido)
06 - A Resposta (Marcos Valle / Paulo Sergio Valle)
07 - Sonho de Um Carnaval (Chico Buarque)
08 - Feitinho Pro Poeta (Baden Powell / Luis Fernando Freire)
09 - Aruanda (Carlos Lyra / Geraldo Vandré)
10 - Tristeza (Haroldo Lobo / Niltinho Tristeza)
11 - Ora Bolas (Ian Guest / Zilmar de Araújo)
12 - Encanto Triste (Durval Ferreira / Pedro Camargo)

Jacqueline Lagrange - Le Futur Interdit


Bonne pioche (dans un vide-grenier de province) que cet ouvrage paru en 1970 chez "Les Productions de la Seine", pour qui l'auteure a traduit de l'anglais un récit érotique (Mémoires d'un libertin du XIXe siècle) et proposé ce texte de sa prose, dont l'amateur de littérature licencieuse ressortira enchanté. Le Futur Interdit narre les aventures sexuelles de James Moissinac, un grand bourgeois quinquagénaire, coincé et las, déprimé par des lendemains qui vieillissent. Le Docteur Berger, ami fortuné et hédoniste notoire, l'invite sur la Côte d'Azur pour une cure de sorties en mer, avec champagne et belles pépés. Le catalyseur érotique du récit est la rencontre de Domino, une femme fascinante qui vit dans un présent perpétuel (d'où le titre), pour le seul plaisir de savourer chaque instant. On devine que l'épicurisme joyeux de Domino permettra très vite au protagoniste de retrouver sa vitalité. Vu comme ça, le pitch rappelle des dizaines de séries Z érotiques, parfumé ici aux thèses libertaires et sensualistes des années 70, avec travaux pratiques.
Qu'on se détrompe ! Car ce serait compter sans l'originalité d'écriture de Jacqueline Lagrange, ses métaphores audacieuses, sa façon d'exposer les pensées intimes de chacun des protagonistes dans une manière de style indirect libre, qui frappent dès les premières pages et laissent entrevoir quelques vérités inédites de l'âme humaine lorsqu'elle est confrontée à la chair.

11.7.08

Off The Sky - Cumulae Movement



Composition unique de 27'44" Cumulae Movement, est un OVNI planant de toute beauté, digne d'être rangé entre The Shutov Assembly de Brian Eno et World Receiver de Tetsu Inoué ; car elle ravira les amateurs d'ambient organique et ouatée comme des nuages irradiés de particules sonores, de clics mystérieux, de minuscules bruits environnementaux, d'échos et de filaments de mélodies. Off the Sky est le moniker météorologique d'un certain Jason Corder, avec qui il faut désormais compter. On en reparle bientôt.

FREE ep below
Cumulae Movement

"Cumulae Movement" revolves around the formation of a well-known weather phenomenon know as cumulous clouds. According to Jason he wanted to "create a movement of sound that mimicked the nature of these billowy, slow, shape-shifting atmospheric giants. So this rather long, dense piece simulates the time that Jason spent watching the clouds slowly progress across his field of view.

As a cumulous cloud moves across the sky, its shape is constantly changing, taking on several different forms during its life cycle. Likewise, as you listen, you?ll find that "Cumulae Movement" is an evolving piece consisting of several distinct parts that are interconnected by the same general motif. So find a natural location - an open field, a lake, a beach, a secluded hill or mountain - and enjoy this beautiful, placid ambient symphony.
Quotation from spiritualarchives.blogspot.com

9.7.08

Artur Barrio - Livro de Carne

"Artur Barrio est un artiste vraiment à part. Inspiré par Dada et le surréalisme, il n'a jamais appartenu à aucune école, n'a vraiment suivi aucun courant. C'est sans doute la quête de liberté qui caractérise sa démarche, son acception de la création artistique. Il travaille avec des matériaux précaires, des éléments récoltés de ci de là. Il crée des installations, des univers éclatés constitués de bouts de mots, de morceaux de chair, d'éléments disparates. Ses oeuvres sont des compositions concrètes, des rythmiques spatiales, chaotiques, vis-à-vis desquelles le spectateur ne peut opter pour une rationalité froide, distanciée. L'institution artistique, le contexte muséal lui sont toujours apparus d'une lourdeur incroyable. Il s'en joue. On parle souvent de lui comme d'un provocateur, mais c'est sans doute parce que depuis la fin des années 60, Artur Barrio n'a rien lâché de son exigence de liberté." LG dans la revue Mouvement, Sept-Déc. 2005

La pièce qui m'a le plus fasciné parmi les créations d'Artur Barrio est un morceau de viande "feuilletée", créé en 1978. C'est d'une simplicité terrible, saisissante et d'une grande richesse de sens. Du surréalisme cette pièce a l'audace et la brutalité poétique de même que, quelques décennies auparavant, la tasse en fourrure de Meret Oppenheim fouettait la porcelaine froide et civilisée par son odeur de musc et son poil sauvage. Barrio, lui, incarne l'opposition entre nature (la chair) et culture (le livre), réunis en un seul élément : Le Livre, biblos, qui a la couleur rouge du sang de celui qui a donné sa chair pour les hommes. La polysémie du titre, Livro de Carne, évoquant tout à la fois une pièce de 500g (une livre) de viande et un Livre de chair, est là encore un bel exemple de l'humour noir et surréaliste de Barrio. Enfin si l'on veut se donner la peine de se pencher sur les récits d'anthropophagie qui appartiennent aux mythes fondateurs de l'histoire du Brésil... on ne regarde plus un steak de la même façon. Je m'en vais dès demain commander des bifteck au carré, feuilletés et savoureux comme une bonne tranche de littérature !

2.7.08

Skylab#1


Voici un disque que j'avais acheté en 1994 pour la beauté du graphisme et du digipack cartonné. A l'époque, trip hop et ambient battaient son plein, mais Skylab#1 ne faisait qu'aborder de loin ces courants, car l'album s'écoute plutôt comme une rêverie musicale et poétique inclassable, un ensemble de ballades downtempo imprévisibles, écrites et produites par un certain Howie B, dont on connaîtra davantage les disques parus ultérieurement sous son nom (Music for Babies, Snatch, Mayonnaise). Le rip est chez sleepwalkingdreamweaver.

This album was released in 1994 on Astralwerks. This one of those albums that I bought without hearing or being told about. Have you ever done that? I just saw the album cover, noticed it was on Astralwerks, and bought it. I've discovered a few gems just by looks. That's how I found out about Pizzicato Five, the Tiki Tones, and Pavement. I don't do that so much anymore but back then I was young and could buy whatever since my mom paid the rent. Anyway, back to our album. Here's the rundown. Apparently Mat Ducasse took a lot of acid in his attic and produced tons of mix tapes of weird samples and loops. He mailed them to Howie B who then, with Love TKO (from the Japanese hip hop Major Force label), put them together to create a very trippy and mind expanding movie like album. You could call it downtempo but that word wasn't being thrown around back then. It's like ambient trip-hop. Or ambient breakbeat. It's ambient. It's weird. The song "Seashell" got used on a lot of chill compilations. That song is pretty great but the album is so much more than that one track. The album is an experience. It starts out strong and then gradually slows down by the middle to almost minimal sound and then it slowly builds back up to about the same speed as the beginning. If you've heard Howie B's "Music for Babies" it's probably closest to that as far as his catalog goes. Check it out. Excerpt from MOG - fistula spume's Posts

Stéphane Kiehl - Y a un truc !



L'illustrateur, graphiste et plasticien Stéphane Kiehl, je l'ai découvert à travers un livre éclatant de couleurs et d'images, Y a un truc !, publié aux Editions du Rouergue.
Le titre, homonyme d'une émission célèbre, est un hommage à Gérard Majax, le magicien qui fascinait les enfants des années 70-80. Stéphane Kiehl y met en scène un magicien moustachu, Bernard Majox, et s'emploie à démystifier son numéro de magie en expliquant, via différentes planches parsemées d'images infantiles, que des petits extraterrestres transparents sont à l'oeuvre pour tromper le public.
Hilarant, coloré, virtuose de graphisme, amateur de personnages de BD, de vieilles réclames détournées et de dessins foutraques, Stéphane Kiehl se paie le luxe d'une double page de blagues régressives assorties d'onomatopées.